Les Saintes Maries
Marie-Jacobée et Marie-Salomé
 

Comme chaque année, le pèlerinage des Saintes Maries de la Mer réunit des dizaines de milliers de Tsiganes (Gitans, Manouches, Roms) venus de toute la France et de quelques pays d'Europe (Allemagne, Italie, Suisse, Hollande, Espagne)
Il se déroule durant deux jours: 24 et 25 mai
Pourtant, depuis quelques jours, des centaines de caravanes sont arrivées aux Saintes Maries car les Tsiganes commencent leur MISSION PÈLERINAGE le 19 mai. A partir de ce jour-là, et durant une semaine, l'aumônerie nationale, les équipes régionales et diocésaines se répartissent l'animation de tous les terrains où stationnent les familles du voyage. La catéchèse des enfants, les réunions avec les adultes, la messe sur les terrain, les rencontres à la crypte et la grande veillée du soir dans l'église des Saintes remplissent bien les journées. 

Les Saintes Maries que l'on vénère sont connues par l'Évangile. Marie-Jacobé est la mère de Jacques le Mineur et de José, probablement aussi des apôtres Jude et Simon. Salomé est la mère des apôtres Jacques et Jean. Proches parentes de la Sainte Vierge, elles ont tout quitté pour suivre le Christ et restent liées aux grands événements de sa vie: elles se tiendront, courageuses, au pied de la croix et, au matin de Pâques, avec leurs vases de parfum devant le tombeau, elles seront les premières messagères de la Résurrection. Enfin, on les retrouve en prière au Cénacle, dans l'attente de la Pentecôte.
D'après la tradition provençale les Saintes Maries auraient abordé les plages camarguaises avec d'autres disciples au moment de la persécution qui chassa de Palestine  et dispersa tous les amis de Jésus.
Cette tradition fort ancienne se rattache probablement au désir qu'avaient les églises primitives de se
relier aux saints qui avaient connu le Seigneur...
Bien avant la venue des Gitans, ce pèlerinage fut et reste encore le rassemblement des chrétiens
de Provence et du Languedoc.

Chronologie

1448 :Invention (c'est à dire "découverte") des reliques des Saintes Maries.
1512 : Création de la confréries des Gardinas à Arles.
1801 : Reprise du pèlerinage après la révolution.
1838 : Le village prend le nom des Saintes-Maries-de-la-Mer.
1850 : Construction des nouvelles châsses des Saintes Maries.
Entre 1848 et 1855 : pèlerinage de Mistral aux Saintes-Maries-de-la-Mer.
Il mentionne la présence des Bohémiens dans la crypte.
1852 : "L'illustration" publie un article sur le pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer signalant la présence des bohémiens.
1862 : Reprise de la procession à la mer: Bénédiction des nouvelles statues des Saintes Maries.
1888 : Van Gogh peint les roulottes aux Saintes Maries.
1892 : Création de la ligne de chemin de fer Arles-Trinquetailles-les-Saintes-Maries-de-la-mer.
1895 : Arrêté préfectoral interdisant la présence des Bohémiens aux fêtes des Saintes Maries.
1898 : Création d'un registre des visiteurs pour l'église des Saintes maries de la-Mer. Les Bohémiens reviennent au pèlerinage.
1907 : Le député de Savoie Fernand David veut interdire le rassemblement des Bohémiens au pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer.
1920 : Début de l'épiscopat de Mgr Maurice Rivière jusqu'à 1930. Les Gitans portent la barque des Saintes-Maries-de-la-Mer lors de la procession. Cette pratique devient une tradition
1921 : Une messe réservée aux Gitans est instaure dans la crypte. Les Gitans participent pour la première fois à la descente des châsses des Saintes Maries.
Mise en place de l'escorte de l'archevêque par les Gardians, de la gare jusqu'à l'église des Saintes, les jours de pèlerinage.
1923 : Ouverture des châsses et inventaires des reliques.
1925 : Mise en place de l'escorte de la barque des Saintes Maries par les Gardians le jour de la procession.
Le guide bleu parle du folklore gitan dans son guide sur la Provence.
1934 : L'archevêque d'Aix Mgr Coste, interdit le prêche en provençal, et défend aux Bohémiens de porter la statue de Sara lors de la procession du 25 mai.
1935 : Mgr Roques accepte que les Gitans portent la statue de Sara en procession jusqu'à la mer le 24 mai. Le clergé ne participe pas à cette procession qui n'est que tolérée.
1942 en juillet 1944 : Présence d'un camp d'internement de Gitans à Saliers, proche des Saintes-Maries-de-la-Mer.
1945 : Début de l'épiscopat de Mgr Provenchères.
1948 1: Le nonce apostolique Mgr Roncalli préside le pèlerinage pour le XIX centenaire de l'évangélisation de la Provence et le V° centenaire de la découverte des reliques des Saintes Maries.
Fondation des Études Tsiganes par le père Fleuy, François de Vaux de Foletier et Théo Maximoff.
Présence des premières roulottes des petites Sœurs de Jésus au pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer.
1951-21 juillet: Retour des cendres du Marquis de Baroncelli, décédé en 1943,d'Avignon aux Saintes Maries de la Mer accompagnées de nombreux Gitans.
1953: L'aumônerie prend en charge des Gitans venus au pèlerinage. De cette date l'aumônerie introduit dans la procession de Sara Notre Dame des Gitans. Les aumôniers tentent de réduire l'importance du culte dédié à Sara en la mettant en concurrence directe dans sa procession avec un autre culte plus orthodoxe. L'aumônerie nationale para à cette situation en introduisant dans la procession la statue de Notre Dame des Gitans, bénie par l'archevêque de Lourdes en 1958 et couronnée par le pape Paul VI en 1965 et que la plupart des Gitans catholiques considèrent comme leur vénérable patronne (F. Courrier "Le mystère de Sara la noire", Monde Gitan, N°2, 1967).
1955: Parution du premier bulletin d'Études Tsiganes.
1957: Premier pèlerinage à Lourdes.
1963: Mgr Colin est nommé évêque accompagnateur des tsiganes en France.
Création de "La Roulotte" journal lié à l'aumônerie.
1966: L'aumônerie tente de remplacer la procession de Sara par un chemin de croix, mais à la suite d'incidents violents, le clergé décide pour la première fois d'y participer.
1967:Certains Gitans veulent enlever Sara des Saintes Maries de la Mer. L'archevêque d'Aix, Mgr Provenchères déclare: "Le culte de Sara est immémorial, c'est pourquoi je le maintiens sous sa forme traditionnelle".

* notes complémentaires

En 1966, l'aumônerie décide de remplacer la procession de Sara par un chemin de croix à travers le village. Mal compris ou mal expliqué, l'émeute gronde, les rumeurs les plus folles courent alors. On peut lire en titre du Provençal du 26 mai 1966: "La procession des saintes a failli ne pas avoir lieu: on voulait transférer Sara à Lourdes". (Pierre Roumel "Au pèlerinage 1966 des saintes Maries de la Mer", journal le Provençal)
En 1966 excédée par la procession de Sara, l'aumônerie décide de l'éliminer ou de la remplacer par un chemin de croix. L'aumônier Barthélemy a l'initiative de cette action: "J'ai donc sollicité et obtenu une réunion à l'archevêché d'Aix au cours de l'hiver. Nous étions, autour du vicaire général et du curé des Saintes Maries de la Mer une douzaine de responsables de l'apostolat gitan. J'avais distribué à chacun un papier exprimant mes doléances et ma requête. Il ne fallut pas moins de la journée pour aboutir à une solution qui ne supprimait la procession à la mer en la remplaçant par une sorte de chemin de croix à quatre stations. (André Barthélemy, op. cit., 1982)

La volonté de rendre cette procession plus orthodoxe est retenue. L'archevêque d'Aix de Provenchère, Mgr Colin évêque de Digne, les aumôniers en aubes, le clergé sont appelés pour montrer le sérieux du chemin de croix. Mais en définitive, au nom de la tradition "baroncellienne", les Gardians mènent par le beau-fils de Baroncelli, M. Aubanel, refusant d'arrêter la procession aux stations de la ville, et continuent le trajet"traditionnel" de la procession jusqu'à la plage.

Après cette expérience ratée contre Sara, l'archevêque d'Aix, Mgr de Provenchères, se range défensivement du côté des Gitans. Il intervient personnellement en donnant une conférence de presse en 1967 pour montrer sa
conviction envers le culte de Sara. (J.P. Bertaigne, journal Le Provençal, 25 mai).
Sa déclaration reconnaît officiellement l'ancienneté de Sara, et donc la valeur et la validité de son culte :"Le culte de Sainte Sara est un culte immémorial. C'est pourquoi je le maintiens sous sa forme traditionnelle. Comme beaucoup d'autres Saints, il n'est pas possible de donner des précision vraiment historiques sur personnage de Sainte Sara Mai c'est aux historiens et non à l'évêque d'approfondir ce problème". (F. Courrier, op.cit, Monde Gitan, 1967).
*c.f. Le Mémoire de Sophie Bergaglio (Université de Provence/année 1997-1998) "L'Invention d'une Tradition : Évolution du pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer de 1852 à 1967.

1970 : Durant cette décennie, sous l'impulsion du Père René Bernard aumônier régional, puis aumônier national, se structure d'une année à l'autre l'équipe de l'aumônerie pour un meilleur service du pèlerinage gitan.
Rachaïls et religieuses arrivaient deux ou trois jours avant le pèlerinage de 24-25 mai. Iis furent invités à venir toute une semaine avant les fêtes pour mener une action pastorale concertée.

19881 : L'aumônerie décide une mission préparatoire au pèlerinage à partir du 19 mai. Cette initiative donne un nouvel élan aux veillées de prière jusque là peu suivies par les voyageurs, à part la veillée du 23 mai instituée par Yoshka vers 1960. Les thèmes de célébrations renouvelés, mieux adaptés aux désirs des voyageurs dans leur présentation et leur déroulement contribuent à une participation de plus en plus importante.

1993 : Messe d'ouverture du pèlerinage le 24 mai. A l'origine il s'agissait d'une messe pour "gadgé" qui venaient au pèlerinage à laquelle se joignaient quelques gitans. Compte tenu de la participation plus grande des voyageurs, l'animation de cette messe est confiée aux aumôniers et aux voyageurs qu'ils accompagnent.
Au fil des années cette messe deviendra officiellement la messe du pèlerinage gitan telle que nous la connaissons aujourd'hui.

Pierre CAUSSE