Trois ans de camp pour Eugène, le petit nomade
Il est considéré comme « interné politique », mais c'est sa condition d'enfant de gens du voyage qui valut à Eugène Fauveau de passer trois ans derrière les barbelés. Voici sa carte délivrée par le ministère des Anciens combattants.
Âgé maintenant de 74 ans, il retournera dimanche 13 avril 2008 à Moisdon, là où il fut interné pendant la Seconde Guerre mondiale, comme des centaines d'autres gitans français. Leur mémoire sera évoquée.
« Interné politique ». La mention figure sur la carte délivrée par le ministère des Anciens combattants. Eugène Fauveau a passé trois ans derrière les barbelés pendant la Seconde Guerre mondiale. « Interné politique, ça m'a toujours choqué. Je n'ai jamais fait de politique et, à l'époque, je n'étais qu'un gamin. Mais il fallait bien trouver quelque chose... »
Au début de la guerre, les parents d'Eugène sont marchands ambulants, des voyageurs, « des gitans français ». Les pouvoirs publics français décrètent le regroupement puis l'internement des nomades. « On est venu nous chercher dans une petite maison des Deux-Sèvres... balancés par un bon Français. » La famille Fauveau passe en Loire-Atlantique par le camp de Choisel, à Châteaubriant (celui de Guy Môquet), puis atterrit à Moisdon-la-Rivière, dans un camp humide et sinistre installé sur le site d'anciennes forges.
Transféré au camp de Montreuil-Bellay
En 1942, l'armée allemande ferme le camp, insalubre et trop proche de la zone côtière. « Je ne voulais pas monter dans leurs p... de wagons. Les gendarmes m'ont fait grimper à coups de pieds dans les fesses. » Eugène, 8 ans, est transféré au camp de Montreuil-Bellay, dans le Maine-et-Loire, où sont regroupés les nomades de l'Ouest.
« J'y repense chaque jour, confie-t-il. L'appel pour aller chercher la gamelle de soupe. Les avions qui nous tiraient dessus. Les miradors, les fils barbelés sous lesquels je me glissais pour récupérer les épluchures que jetaient les cuisiniers du camp. Quand les gardes s'en sont aperçus, ils ont mis du chlore dessus... Je revois le cachot dans lequel j'ai rejoint mon père. Il s'était évadé puis était revenu pour nous chercher. Il a coupé les fils barbelés et nous avons gagné la Vendée à pied. »
Eugène Fauveau, 74 ans, est devenu « le vieux ». C'est ainsi qu'on l'appelle au camp de Doulon, à Nantes, où il vit depuis de nombreuses années. Sédentarisé, il a jeté le carnet nomade à faire viser dans les gendarmeries, « un mauvais souvenir ». Il n'est jamais retourné à Montreuil-Bellay : « Là, je bloque. » Le temps a estompé Choisel et Moisdon.
Alors, dimanche matin, Christophe Sauvé, aumônier et vice-président de l'association des gens du voyage catholique, viendra le chercher pour l'emmener aux cérémonies officielles de Moisdon-la-Rivière. Pour la première fois, en présence de l'évêque de Nantes, et du maire, seront associés dans le même hommage les fusillés de Châteaubriant, les nomades et les réfugiés espagnols qui les précédèrent dans ces camps.
« On ne demande pas des fleurs, dit Eugène Fauveau, simplement qu'on parle de nous. » Qu'on n'oublie pas le sort des nomades dont beaucoup ne retrouvèrent la liberté qu'en 1946.
Marc LE DUC
RASSEMBLEMENT LE 28 AVRIL
2007
A L'OCCASION DE LA COMMEMORATION
DE L'INTERNEMENT DES TSIGANES AU CAMP DE MONTREUIL BELLAY (49)
Jeudi 26
avril à partir de midi et
vendredi 27: arrivée des caravanes
Samedi 28: 9 heures marche
silencieuse des voyageurs jusqu'au site de l'internement
10h30: participation à la commémoration
officielle (discours, dépôt de gerbes) vin d'honneur.
16h: messe de la paix célébrée par Mgr SOUBRIER évêque
de Nantes
Soirée festive
Dimanche 29 : rencontre débat avec
des historiens
18h: spectacle avec la pièce "Gadji"
Lundi 30: Départ des caravanes pour
midi.
BIBLIOGRAPHIE
sur l'extermination des Tsiganes:
Denis PESCHANSKI, avec la collaboration de Marie-Christine
HUBERT et Emmanuel PHILIPPON, Les Tsiganes en France 1939-1946, Editions
du CNRS, 1994.
Évelyne PY, Les Tsiganes en France, Mémoire-Info, dossier
en ligne sur le site Mémoire Net, janvier 2003.
http://www.memoire-net.org/article.php3?id_article=135
Laure DEVOUAST, " Le règlement de la question tsigane en Allemagne
et en France occupée ", Le Patriote résistant, n°
732, octobre 2000.
" La mémoire effacée et retrouvée du camp «
modèle » des Gitans ", Le Monde, 9 mai 2001. Entre 1942
et 1944, 700 Gitans venus de toutes les régions de France ont été
regroupés et internés dans le camp de Saliers, sur la commune
d'Arles.
Mathieu PERNOT ( sous la direction de ), Un camp pour les bohémiens,
textes d'Henriette ASSÉO et Marie-Christine HUBERT, Actes Sud,
2001.
" L'internement des Tsiganes en France 1939-1946 ", dossier,
Ministère de la Défense, Direction de la Mémoire,
du Patrimoine et des Archives, Les Chemins de la Mémoire, n°
108, juin 2001.
Henriette ASSÉO, " L’extermination des Tsiganes ",
in Stéphane AUDOIN-ROUZEAU, Annette BECKER, Christian INGRAO, Henry
ROUSSO ( sous la direction de ), La violence de guerre 1914 - 1945, Bruxelles,
Complexe, 2002.
Guenter LEWY, La persécution des Tsiganes par les nazis, collection
Histoire, Les Belles lettres, 2003.
Emmanuel FILHOL, La mémoire et l'oubli. L'internement des Tsiganes
en France 1940-1946, Paris, L'Harmattan, 2004.
A lire, à visiter
:
Les tsiganes sous l’oppression nazie:
de Donald Kenrick et Grattan Puxon- Collection interface - Centre
de Recherches Tsiganes- CRDP Midi-Pyrénées - 1996.
De la " Science raciale aux camps " :
les tsiganes dans la seconde guerre mondiale. - Collection interface
- Centre de Recherches Tsiganes- CRDP Midi-Pyrénées - 1996
Les Tsiganes en France 1939-1946
de Denis Peschanski, avec la collaboration de Marie-Christine
Hubert et Emmanuel Philippori, CNRS Editions, 1994.
La France des camps (1938-1946)
Denis Peschanski, thèse de doctorat, 2000 http://histoire-sociale.univ-paris1.fr/cherche/Peschan2.htm
Un article de Marie-Christine Hubert , publié sous le titre
« Les réglementations anti-tsiganes en France et en Allemagne,
avant et pendant l’occupation » dans La Revue
d’histoire de la Shoah - le monde juif du Centre de documentation
juive contemporaine (n° 167 de sept.-déc. 1999 « Les
Tsiganes dans l’Europe
allemande »).
Le règlement de la question tsigane en Allemagne et
en France occupée, un article du Patriote Résistant
d’octobre 2000, n°732, journal édité par la FNDIRP.
Samudaripen, le génocide des Tziganes, AUZIAS
(Claire), l’esprit frappeur (20F.) ,
http://www.monde-diplomatique.fr/2000/10/GANDINI/14404
Le siècle des camps- Kotek Joël et
Rigoulot Pierre- JC Lattès 2000. Chapitre : » 1933 le nazisme.
»
De longs développement sur le sort des Tsiganes dont la déportation
est décidée en décembre 1942 .
Enseigner l’Holocauste au 21 siècle, Jean-Michel
Lecomte
http://www.coe.int/T/F/Coop%E9ration_culturelle/education/
L’enseignement_de_l’histoire/Histoire_du_20e_si%E8cle/
Th%E8mes_abord%E9s/Enseignement_de_l’Holocauste/HOLO_F.PDF
Les Tsiganes dans l’Europe allemande .EDITORIAL
DU NUMERO 167, par Georges Bensoussan ,
http://perso.wanadoo.fr/memorial-cdjc/fr/monde167.htm
Colloque des historiens sur les " Gens du Voyage ".
Arc-et-Senans - 12 mars 1999.
http://artic.ac-besancon.fr/histoire_geographie/Documents/Coltsig.htm
1939-1946, France : L’internement des Tsiganes,
Études Tsiganes, vol. 6 n°2/1995,
http://www.chez.com/aipj/genocide_tsiganes2.htm
Les Tziganes en Tchécoslovaquie, http://www.memoire-net.org/ailleurs...
UN CAMP POUR LES TSIGANES. SALIERS. 1942-1944, Extraits
du Dossier Pédagogique, Un camp pour les tsiganes. SALIERS. 1942-1944
deux témoignages sur l’internement des Tsiganes au camp d’Arc-et-Senans
http://www.etudestsiganes.asso.fr/tablesrevue/filholvol13.html
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Près des Saintes Maries de la Mer
Pour ne pas oublier
LE CAMP GITAN DE SALIERS
des Gitans déposent
une gerbe au pied de la stelle qui
vient d'être inaugurée
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La stelle rappelle les 700 nomades qui furent
internés
sous le régime de Vichy
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